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Louis XIII était-il gay ?

Le 28 novembre1615, Louis XIII, alors âgé de 14 ans, roi de France depuis 5 ans, épouse Anne d’Autriche, la fille du roi d’Espagne, Philippe II. Las, le jeune souverain n’éprouve guère de passion pour la reine, et préfère chasser et passer son temps avec son premier favori, Charles d’Albert de Luynes. Au départ, les cours d’Europe s’étonnent un peu (surtout au souvenir du père du roi, Henri IV, qui avait plutôt tendance à sauter sur tout ce qui portait jupon), mais après tout, Louis XIII et Anne d’Autriche sont encore bien jeunes.
Il faudra attendre janvier 1619 pour que le mariage soit enfin « parfait », c’est-à-dire consommé. Mais là aussi, la cour aura dû intervenir et forcer quelque peu la nature du jeune roi.

D’abord la leçon de choses. L’Eglise se propose de mettre une maîtresse dans le lit du roi pour qu’il découvre de nouveaux plaisirs. Mais Louis XIII est le Très-Chrétien, et il refuse d’être infidèle. On profitera donc du mariage d’une des demi-sœurs de Louis pour lui montrer comment ça se passe. Voici le compte-rendu de l’ambassadeur vénitien, Angelo Contarini, de la nuit du 23 janvier 1619 : « Le mercredi, avant que le duc d’Elbeuf dormît avec son épouse Mlle de Vendôme [la demi-sœur de Louis XIII], le roi a voulu être présent une bonne partie de la nuit sur le propre lit des deux époux pour voir consommer le mariage, ce qui fut répété plus d’une fois, à quoi le roi applaudit grandement et en manifestant un plaisir particulier. On pense que cet exemple a eu une grande vertu pour inciter Sa Majesté à faire de même, et l’on dit encore que sa sœur naturelle, Mlle de Vendôme, l’a invité à l’action par les paroles suivantes en lui disant : Sire, faites, vous aussi, la même chose avec la reine et bien vous ferez. »

Quelques jours après, en effet, Louis passait enfin à l’action, mais encore fallut-il l’aider encore un peu. Tout se joue le 25 janvier 1619. C’est d’Héroard, médecin du roi, qui raconte l’événement : « ... Va chez la reine, revient à dix heures, devestu, faict ses affaires, jaune, mol, beaucoup, beu de la ptisane, mis au lit, prie Dieu. A onze heures ou environ sans qu’il y pensast, M. de Luines [le favori] vient pour le persuader à coucher, etc. Il résiste fort et ferme, par effort, jusques aux larmes. Il est emporté, couché ; s’efforce deux fois comme l’on dit, a deux heures havoit mis deux fois, revient devestu, mis au lit, s’endort jusques neuf heures après minuict  ».
Angelo Contarini, toujours ce fameux ambassadeur vénitien, relate lui aussi l’événement (traduction) : « On dit que la cause principale de cette union a été le Luynes ; qui, ayant accompagné Sa Majesté qui était toute déshabillée ce soir-là, jusqu’au voisinage du lit de la reine et voyant que le roi restait encore irrésolu, sur le point de savoir s’il devait ou non dormir avec la reine, sortit de la chambre et en ferma la porte.  »

Le mariage fut bien consommé cette nuit-là (a priori, six fois), mais il faudra encore attendre 19 ans pour que naisse enfin un dauphin, le petit Louis-Dieudonné, futur Roi Soleil...